Vous envisagez d’opter pour une méthode Agile pour mener à bien votre projet informatique. Les méthodes Agiles chamboulent les habitudes et la vision traditionnelle des gestions de projet. Mais quels risques posent-elles ?
Quels bénéfices possibles ?
Comparées aux méthodes traditionnelles, les méthodes Agiles :
- donnent au client une meilleure visibilité sur l’avancée du projet ;
- lui permettent de modifier l’orientation du projet quand celui-ci connaît des difficultés ;
- lui permettent de disposer d’un produit utilisable au plus tôt, qui est complété au fur et à mesure ;
- permet d’adapter le projet à l’évolution des technologies et des demandes d’évolution du client sans remettre en cause toutes les avancées antérieures ;
- donnent au prestataire plus de souplesse dans sa manière de gérer le projet, en sortant du cadre d’un calendrier prévisionnel lourd et qui ignore le facteur humain.
Cependant, les méthodes Agiles ne présentent pas que des avantages.
Quels risques pour les parties ?
La maîtrise du budget est une question épineuse dans tout projet en Agile : le choix d’un paiement en régie est défavorable au client car il est difficile de prévoir la durée d’un tel projet, son envergure, surtout si le projet connait beaucoup d’évolutions. Le choix du forfait est, pour les mêmes raisons, défavorable au prestataire. Ainsi, en cas de recours dans le cadre de la réalisation de ces prestations à des sous-traitants, ces derniers sont payés en régie. Le prestataire peut éventuellement se retrouver difficultés financières. Le juge a déjà pu prendre en compte un tel déséquilibre en ordonnant à un client de verser des sommes supplémentaires au prestataire ayant exécuté correctement ses prestations (Cour d’Appel de Paris 3 juillet 2015 SET Environnement et SFEIR)
La prise en compte des évolutions des besoins du client peut également mener à ce que le projet n’aboutisse plus, pour cause de changements incessants de direction. Les litiges qui éclateront en cas d’abandon du projet seront particulièrement complexes. Le recours à une méthode Agile rend difficile la délimitation des obligations et des parts de responsabilités dans l’échec du projet de chacune des parties.
Ce problème est particulièrement saillant sur la question de la qualification des obligations en obligation de moyens ou de résultat. Le client aura plus de difficulté à se retourner contre le prestataire même pour alléguer du manquement à une obligation de résultat, le juge ayant considéré qu’une collaboration étroite entre les parties est susceptible de constituer un aléa permettant d’écarter une obligation de résultat (Cass Com 5 avril 2011).
En cas d’échec ou d’arrêt du projet, la rupture brutale des relations commerciales par l’une ou l’autre des parties, pourrait être contesté du fait même de l’utilisation d’une méthode Agile (TC Paris 13e chambre 9 mars 2015 Lucas Meyer Cosmetics contre Marty Soft).
Comment sécuriser un projet en mode agile ?
Avant d’opter pour une méthode de gestion de son projet informatique, il convient de passer par une phase de questionnement, en s’orientant dans une perspective de « risk management ».
Une fois le choix d’une méthode Agile arrêtée, il convient d’encadrer strictement non pas le périmètre du projet en lui-même ou ses spécifications, mais les modalités de sa gouvernance. Les demandes d’évolution du client et la manière dont ils doivent être transmis et pris en compte par le prestataire et sous quels délais devront également faire l’objet d’accords. Les parties auront de cette façon les outils en main pour réussir pleinement leur projet.
La collaboration des parties dans une méthode Agile est essentielle : il faudra donc s’accorder très précisément sur la composition des équipes des deux parties, sur leur stabilité, sur les pouvoirs du comité de pilotage. Il conviendra particulièrement de s’assurer de la stabilité de l’Assistant à Maîtrise d’Ouvrage (AMOA) : si celui-ci change sans cesse ou ne s’implique pas, le projet est voué à l’échec.
Pour permettre aux parties de maintenir le cap et de maîtriser leur budget respectif dans le cadre d’un contrat dépourvu d’une date de fin prédéfinie, il conviendra de mettre en place un calendrier solide, comprenant des réexamens réguliers de l’avancée du projet. On pourra ainsi définir qu’au bout de cinq sprints, le comité de pilotage se réunira, établira le programme général des prochains sprints, et allouera un budget. Les prestataires ayant beaucoup recours à des sous-traitants passeront, quant à eux, des contrats agiles en cascade avec leurs sous-traitants.
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