Le Règlement relatif à un marché unique des services numériques, dit Digital Services Act (DSA), a été adopté le 19 octobre 2022. Proposé par la Commission européenne fin 2020, ce texte modifie la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique encadrant notamment les contenus illicites en ligne.
Il constitue l’un des deux volets d’un paquet législatif visant à réformer l’espace numérique. Le DSA vise notamment à lutter contre la diffusion de contenus illicites et à instaurer plus de transparence entre les plateformes en ligne et leurs utilisateurs.
A noter que le second volet, le Digital Markets Act (Règlement relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique), encadre l’activité économique des grandes plateformes numériques dans l’Union européenne. Il vise à renforcer la concurrence et la promotion des relations équitables entre les plateformes et les entreprises. Il a été adopté le 14 septembre 2022.
Ces deux textes ont une entrée en vigueur progressive, avec plusieurs étapes prévues entre mai 2023 et février 2024.
ocus sur les apports majeurs du DSA.
Une mise en œuvre progressive du Digital Services Act
Depuis son adoption le 19 octobre 2022, le Digital Services Act est entré progressivement en application :
25 Avril 2023 : désignation des très grandes plateformes et moteurs de recherche par la Commission européenne.
- Le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, dévoilait, le 25 avril 2023, la liste des 17 très grandes plateformes (VLOP – Very large online platform) et 2 très grands moteurs de recherche, comptant au moins 45 millions d’utilisateurs actifs par mois, qui ont jusqu’au 25 août 2023 pour se conformer aux dispositions du DSA, sous peine de devoir payer des amendes pouvant aller jusqu’à 6 % de leur chiffre d’affaires mondial.
22 juin 2023 : publication au Journal Officiel de l’UE d’un Règlement fixant les modalités d’exécution de certaines procédures prévues par le DSA.
Celui-ci fixe les règles relatives aux modalités pratiques concernant :
- les inspections menées en vertu de l’article 69 du DSA ;
- les mesures de contrôle adoptées en vertu de l’article 72 du DSA ;
- l’exercice du droit d’être entendu et les conditions de la divulgation prévus à l’article 79 du DSA.
25 août 2023 : date butoir de mise en conformité des très grandes plateformes et moteurs de recherche
17 février 2024 : mise en conformité des autres acteurs
Quels sont les contenus et les acteurs visés par le DSA ?
- Qu’est-ce qu’un contenu illicite ?
Les contenus illicites sont définis comme tout contenu qui n’est pas conforme au droit de l’Union européenne (UE) ou au droit national d’un État membre (article 2, g). En d’autres termes, le règlement ne définit pas ce qui est illicite, mais renvoie aux lois et réglementations européennes et nationales.
Rappelons que la directive du 8 juin 2000 ne définissait pas non plus la notion de contenus illicites.
- Quels sont les acteurs concernés par les nouvelles règles ?
Le texte vise à s’appliquer à tout fournisseur de services intermédiaires, qu’il soit établi ou non dans l’UE, dès lors que les destinataires de ces services sont établis ou résident dans l’UE.
Le texte maintient les qualifications de fournisseurs des services intermédiaires telles que prévues par la directive du 8 juin 2000, à savoir les fournisseurs d’accès au réseau et de transmission de données, les opérateurs de caching et les hébergeurs.
En revanche, le Digital Services Act introduit de nouvelles qualifications : les plateformes, les moteurs de recherche et les places de marché en ligne.
Concernant les plateformes, elles sont définies comme des fournisseurs de services d’hébergement qui, à la demande du destinataire du service, stockent et diffusent les contenus à un nombre potentiellement illimité de tiers (article 2, h). Ainsi, à la différence des hébergeurs, ces acteurs permettent également la diffusion des contenus.
A noter que le règlement fait une distinction entre les plateformes et les « très grandes » plateformes. Ces dernières sont celles qui dépassent le seuil de 45 millions d’utilisateurs par mois, étant précisé que ledit seuil fera l’objet d’une réévaluation tous les six mois. En effet, en sus d’un socle de règles communes applicables à toute plateforme, le futur règlement prévoit un cadre juridique plus renforcé pour les « très grandes » plateformes. Il convient de rappeler que sous l’empire de la directive du 8 juin 2000, les plateformes ont été qualifiées d’hébergeurs à plusieurs reprises par les juridictions. Par conséquent, elles bénéficiaient à d’un régime de responsabilité allégé prévu par ladite directive. Ainsi ces acteurs sont responsables au regard des contenus publiés que s’ils ont la connaissance effective de leur caractère illicite ou s’ils n’ont pas agi promptement pour les retirer ou en rendre l’accès impossible alors qu’ils en avaient connaissance.
Un nouveau régime de responsabilité est-il prévu ?
Le règlement n’introduit pas un nouveau régime de responsabilité. Comme les hébergeurs, les plateformes demeureront soumises au régime de responsabilité allégé prévu par la directive du 8 juin 2000. Est également maintenu le principe d’interdiction d’imposer une obligation de surveillance généralisée aux hébergeurs, y compris les plateformes.
Toutefois, par rapport aux hébergeurs, les plateformes ont des obligations supplémentaires qui peuvent varier en fonction de leur taille.
En outre, à la différence de la directive du 8 juin 2000, le règlement précise que les systèmes de modération de contenus volontairement mis en place par les fournisseurs de services intermédiaires (hébergeurs, plateformes, etc.) ne remettent pas en cause le bénéfice du régime de responsabilité allégé prévu par la proposition. Qu’en est-il des nouvelles obligations prévues à la charge des plateformes ? Quelles sont les nouvelles règles proposées pour responsabiliser ces acteurs ? Mathias Avocats consacre un article dédié à ces questions.
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