Le 22 octobre 2013, la Cour de cassation a rendu deux décisions remettant en cause l’utilisation de la géolocalisation par les services de police sous le contrôle du procureur de la République.
Ces décisions portaient sur deux enquêtes préliminaires : l’une relative à un trafic de stupéfiants et l’autre relative à une association de malfaiteurs constituée en vue de la préparation d’actes de terrorisme.
Comment la Cour de cassation justifie-t-elle ses décisions ?
Selon la Cour, l’utilisation de la géolocalisation par les services de police serait contraire au droit au respect de la vie privée protégé par l’article 8 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales.
Or, le procureur de la République, sous l’autorité duquel s’effectuait la géolocalisation, n’est pas indépendant, comme l’a jugé la Cour européenne des droits de l’Homme le 23 novembre 2010.
La Cour de cassation en déduit que, dans le cadre d’atteintes potentielles aux libertés fondamentales et plus précisément au droit au respect de la vie privée, seule une autorité indépendante peut autoriser la géolocalisation.
Quelles sont les conséquences de ces décisions ?
Désormais, seul le juge d’instruction ou le juge de la Liberté et de la Détention devrait pouvoir autoriser le recours à la géolocalisation d’un téléphone portable ou d’un véhicule.
Les conséquences de ces décisions ont été l’annulation de procédures de géolocalisation dans ces deux affaires. Cependant, l’ensemble des services de renseignement est impacté.
La Chancellerie aurait en effet émis une circulaire dès le 29 octobre, à destination des directions opérationnelles de la Police Nationale, afin de suspendre toutes les mesures de géolocalisation en cours.
Dès lors, on peut s’interroger sur un paradoxe : pourquoi la filature par les services de police – qui consiste en la surveillance des déplacements d’un individu – ne serait-elle pas également soumise aux mêmes exigences ?
De même, pourquoi l’infiltration – qui consiste en la surveillance des individus suspectés d’actes de criminalité ou de délinquance organisées en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs – ne serait-elle pas soumise aux mêmes exigences ?
L’affaire Pergame, un programme de surveillance à la française ?
Ces décisions ne manqueront pas d’être citées dans le cadre de l’affaire Pergame (Plateforme d’exploitation et de recueil des géolocalisations appliquées à des mobiles en émission) révélée par Mediapart.
Selon le journal, un programme expérimental de surveillance par géolocalisation de téléphones portables aurait servi pour des enquêtes entre novembre 2012 et janvier 2013. Si les faits sont avérés, les pièces de procédures recueillies par les services de police et gendarmerie grâce à ce mécanisme pourraient être annulées.
[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]